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Lubumbashi : la rétention du passeport de Mgr Donatien Nshole par la DGM suscite des tensions entre l’État et l’Église catholique

La relation déjà tendue entre l’État congolais et l’Église catholique en République démocratique du Congo (RDC) a connu un nouvel épisode critique ce mercredi 26 février. Mgr Donatien Nshole, archevêque de Lubumbashi et secrétaire général de la Conférence Épiscopale Nationale du Congo (CENCO), s’est vu retenir son passeport diplomatique par la Direction Générale de Migration (DGM) à l’aéroport de Lubumbashi. Cet incident intervient dans un contexte politique et social particulièrement volatile, où l’Église catholique joue un rôle central dans la médiation et la défense des droits humains.

Mgr Nshole, de retour de Dar es Salaam en Tanzanie, devait prendre un vol pour Kinshasa afin de participer à une rencontre cruciale avec le président congolais Denis Sassou Nguesso, prévue le jeudi 27 février. Cependant, la rétention de son passeport pendant plusieurs heures par les agents de la DGM a entraîné un retard significatif, perturbant ses plans et suscitant une vive réaction de la part des autorités ecclésiastiques.

Selon des sources proches de l’Église, cette décision des services de migration n’a fait l’objet d’aucune explication officielle. Les représentants de la DGM n’ont pas commenté l’incident, laissant planer le doute sur les motivations derrière cet acte.

L’archevêque de Lubumbashi, Mgr Fulgence Muteba Mugalu, a vivement réagi à cet incident, qualifiant la rétention du passeport de Mgr Nshole de « provocation inacceptable ». Dans un communiqué publié peu après les faits, il a dénoncé une tentative d’intimidation à l’encontre de l’Église catholique, tout en réaffirmant son engagement en faveur de la paix et de la réconciliation en RDC.

« L’Église catholique reste déterminée à œuvrer pour le bien-être du peuple congolais et à promouvoir la justice et la paix. Ce genre d’actes ne nous dissuadera pas dans notre mission », a déclaré Mgr Mugalu. Il a également appelé les autorités à respecter le rôle de l’Église dans la société congolaise, rappelant que celle-ci a toujours été un acteur clé dans les moments de crise.

Cet incident s’inscrit dans un contexte de relations de plus en plus tendues entre l’État congolais et l’Église catholique. Ces dernières années, l’Église a régulièrement critiqué le gouvernement pour son manque de transparence, les violations des droits de l’homme et la gestion de la crise sécuritaire dans l’Est du pays. En retour, certains membres du gouvernement ont accusé l’Église de s’immiscer dans les affaires politiques, créant un climat de méfiance mutuelle.

La rétention du passeport de Mgr Nshole, figure respectée et influente au sein de la CENCO, est perçue par de nombreux observateurs comme un signe de l’escalade des tensions. Elle intervient également à un moment où l’Église joue un rôle de médiateur dans plusieurs conflits politiques et sociaux, notamment dans les régions touchées par l’insécurité.

La société civile congolaise a rapidement réagi à cet incident, dénonçant une atteinte à la liberté de mouvement et une tentative de museler les voix critiques. Plusieurs organisations de défense des droits de l’homme ont appelé à une clarification des faits et à des excuses officielles de la part des autorités.

La communauté internationale, par la voix de certains diplomates en poste à Kinshasa, a également exprimé son inquiétude. « Les institutions religieuses jouent un rôle essentiel dans la promotion de la paix et de la démocratie. Toute entrave à leur travail est préoccupante », a déclaré un diplomate européen sous couvert d’anonymat.

Si l’incident de Lubumbashi peut sembler anecdotique, il reflète une dynamique plus large de tensions entre l’État et l’Église en RDC. Alors que le pays traverse une crise multidimensionnelle – politique, sécuritaire et économique –, le rôle de l’Église comme gardienne des valeurs démocratiques et de la justice sociale est plus crucial que jamais.

Les prochains jours seront déterminants pour comprendre les motivations derrière cet acte et ses conséquences sur les relations entre les deux institutions. La réaction du gouvernement congolais, ainsi que celle de la communauté internationale, sera scrutée avec attention, alors que la RDC s’efforce de trouver une voie vers la stabilité et la paix.

En attendant, Mgr Nshole a finalement pu récupérer son passeport et se rendre à Kinshasa, où il devrait rencontrer le président Sassou Nguesso comme prévu. Cependant, cet incident laisse un goût amer et soulève des questions sur l’avenir des relations entre l’État et l’Église dans un pays en quête de réconciliation.

Justin Mupanya

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