L'information est notre priorité

Nord-Kivu : la Ligue de football toujours basée à Goma, zone sous contrôle du M23

Depuis janvier 2025, la ville de Goma, capitale provinciale du Nord-Kivu, est occupée par les rebelles du M23. Cette occupation a provoqué une réorganisation administrative importante, notamment le transfert temporaire du siège provincial à Beni, une ville restée sous contrôle des forces loyalistes. Cette décision, prise par les autorités nationales et entérinée par le nouveau gouverneur, Kakule Evatiste Somo, visait à assurer la continuité de l’administration dans une zone sécurisée.

Dans ce contexte, tous les services de l’État ont été officiellement appelés à quitter les zones occupées, notamment Goma, pour rejoindre Beni. Une mesure à laquelle la majorité des structures publiques se sont conformées. Cependant, une exception notable demeure : la Ligue de Football du Nord-Kivu (LIFNOKI), qui continue d’opérer depuis Goma.

Un fonctionnement maintenu à Goma malgré le contexte sécuritaire.

Sous la direction d’Eldé Vakatsuraki, la LIFNOKI poursuit ses activités dans la capitale provinciale, bien que cette dernière soit désormais une zone à haute tension sécuritaire. Malgré l’occupation, la Ligue reste active : elle gère les compétitions provinciales, coordonne les phases de la Coupe du Congo et nomme des délégués pour représenter la Ligue dans les territoires non occupés.

Ce fonctionnement hybride, entre gestion centralisée dans une zone occupée et exécution dans les zones sécurisées, soulève plusieurs interrogations légitimes sur le respect des décisions provinciales, la légitimité des organes actuels et la sécurité des processus organisationnels du football dans la région.

Les implications d’une gestion depuis un territoire occupé

Le maintien du siège de la Ligue à Goma pose des problèmes à plusieurs niveaux :

  1. Sur le plan administratif, la non-relocalisation de la LIFNOKI constitue une forme d’exception vis-à-vis des instructions données à l’ensemble des structures étatiques. Cette situation peut être perçue comme un manquement au principe d’équité administrative et de cohérence dans l’application des décisions du gouvernorat.
  2. Sur le plan symbolique, gérer le football provincial depuis une ville occupée par un groupe rebelle envoie un message ambigu. Le sport, en particulier le football, joue souvent un rôle de cohésion sociale dans les contextes de crise. Être associé, même indirectement, à une zone contrôlée par des acteurs non étatiques armés pourrait entamer la crédibilité et la neutralité de la Ligue.
  3. Sur le plan logistique et opérationnel, la coordination des compétitions dans les zones non occupées par une structure installée en territoire rebelle peut compliquer la transparence, la sécurité des données et le bon déroulement des championnats, sans compter les risques de pressions ou d’ingérences.

Entre adaptation et controverse

Il est aussi possible de nuancer cette situation. Certains observateurs estiment que la LIFNOKI a choisi de rester à Goma pour éviter une rupture dans le fonctionnement du football provincial, considérant que les infrastructures sportives, les ressources humaines et les bureaux y sont historiquement concentrés.

De plus, aucun rapport officiel n’indique que la Ligue collabore avec les forces rebelles ou qu’elle bénéficie de leur soutien. Il s’agirait donc davantage d’un choix pragmatique, guidé par la volonté de maintenir les compétitions et la vie sportive dans la province.

Toutefois, cette explication reste controversée, car elle entre en contradiction avec la politique officielle de l’État congolais qui considère Goma comme une ville temporairement non opérationnelle pour ses services.

Conclusion : une situation à clarifier

La gestion actuelle du football au Nord-Kivu met en lumière une zone grise entre impératifs sportifs, considérations sécuritaires et décisions politiques. Le maintien de la LIFNOKI à Goma constitue un cas unique dans la province, qui mériterait une clarification officielle, soit par les autorités sportives nationales, soit par le gouvernorat.

Dans un climat où la confiance dans les institutions est déjà mise à l’épreuve, notamment par l’insécurité persistante, il est essentiel que le football – un domaine cher à la population – reste un exemple de rigueur, de neutralité et de respect des normes établies.

Remias Sumaïli

Partager

Laisser un commentaire

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *